La Baze : un ambitieux lieu artistique en gestation
Porté par un collectifs d'artistes et d'association culturelles en Corrèze
La Baze ne s’annonce pas comme un lieu de plus mais comme un équipement connecté aux autres lieux de création néo-aquitains, ouvert à tous les publics et modulable. En cours de développement par le Centre Régional des Musiques Traditionnelles du Limousin (CRMTL), le collectif Lost in traditions et la Compagnie de cirque La Dérive, La Baze a pour objet de faciliter la création artistique en milieu rural. Champs Libres vous présente un état des lieux de cet ambitieux projet encore en gestation.
Le projet est sur les rails. Les conventions de partenariats avec la commune de Chamboulive, garante du projet, et la Région Nouvelle-Aquitaine sont en cours de signature. Suivront les premières mises aux normes pour accueillir les artistes et le public cet été. Pour les travaux plus coûteux de rénovation des trois bâtiments constituant le corps de ferme, il faudra attendre le résultat du financement participatif qui sera lancé en septembre à l’occasion de la Fête de la Baze.
La Baze, c’est le nom retenu pour ce lieu de création singulier. Un jeu de mot avec celui du hameau où il se situe, Bazaugour, situé à quelques kilomètres de Chamboulive en Corrèze. Mais pas seulement. Pour le collectif Lost In Traditions qui porte le projet et dont certains membres sont originaires du village, La Baze est l’outil qui leur permettra d’élargir leur espace de création et de disposer d’une autonomie de production. Une base, une maison-mère ou pour reprendre la métaphore spatiale utilisée pour décrire ce projet, un tiers-espace. « Sur ce territoire, il y a des équipements dédiés à la diffusion. Mais ils laissent peu d’espace-temps pour créer. En plus le collectif [ndlr : Lost In Traditions] et la compagnie [ndlr : La Dérive] ne peuvent pas en disposer de manière complètement libre », explique Mathilde Charbonneau, la coordinatrice du projet.
Un lieu de création connecté et pluridisciplinaire
Trouver un endroit où établir ce lieu a été plutôt simple. Les partenaires du projet – le collectif Lost In Traditions, la compagnie de cirque La Dérive et le Centre Régional des Musiques Traditionnelles du Limousin (CRMTL) – se sont rapidement mis d’accord sur un corps de ferme situé sur la route départementale 940, celle-là même qui relie Chamboulive à Seilhac, au nord de Tulle.
L’ancien habitat est dans son jus des années 80 mais le bâtiment agricole et la grange ont l’avantage d’offrir des espaces modulables. La vue en réjouira – ou en inspirera – certains : on aperçoit les Monts du Cantal, par beau temps. « Avec La Baze, il y a l’idée de designer, de créer des espaces adaptés à une variété de pratiques, modulables et transformables, qui peuvent s’adapter à des formes de création pluridisciplinaires. »
Le maître mot de ce projet ? La polyvalence. Car là seront accueillis des artistes aux spécialités diverses. Les musiciens de Sans Salvador ou de Brama, les comédiens de la compagnie de théâtre Les Nuages noirs (tous membres du collectif San Salvador), comme les circassiens de la compagnie La Dérive, mais aussi des danseurs, des comédiens et.… des artistes de passage. « Notre envie, c’est de pouvoir avoir accès à un espace scénique le plus polyvalent possible » explique Gabriel Durif, membre fondateur de Lost In Traditions. Notre envie c’est de ne pas être dans un lieu dédié à des musiciens mais de pouvoir consacrer la pluridisciplinarité. Les musiciens ont besoin de se confronter au pluridisciplinaire, car cela fait bouger la musique. »
Même si les réflexions autour de l’architecture sont en cours et que peu de choses, à ce stade du projet, sont arrêtées, il est néanmoins certain que La Baze accueillera autant de spectacles circassiens aériens nécessitant une grande hauteur sous plafond que des concerts de danses et de musiques traditionnelles. « Nous travaillons sur la pluridisciplinarité en complémentarité avec d’autres structures qui sont aussi nos partenaires. L’UPCP-Métive à Parthenay dans les Deux-Sèvres dispose d’un lieu le Carré noir, une grande scène, et La Ciutat à Pau a sa salle de création. Nous ne voulons pas refaire la même chose. On s’inscrit dans une circulation des lieux à l’échelle de la région. »
D’ailleurs, des résidences de création seront organisées. Dans le cadre du dispositif Garage Résidence – Station d’essence patrimonial, un projet peut bénéficier de quatre à cinq résidences de création dans le réseau selon les besoins du projet. La Baze sera sur leur route.
L'erreur serait d'être en surplomb du territoire au lieu d'être à ses côtés.
Gabriel Durif
Un lieu ouvert aux publics et inscrit dans le territoire
Autre certitude : les habitants y auront leur place. « On veut prendre le temps et le pouls du territoire, confie Gabriel Durif. Le territoire a son rythme, ses codes et la culture n’en fait pas toujours partie. On ne veut pas arriver avec nos gros sabots de cultureux. On veut créer les conditions pour que le plus grand nombre s’approprie les espaces. Alors, comment on y arrive ? » La question est actuellement au coeur des réflexions.
Pour donner une légitimité de territoire à ce projet de centre culturel rural, la transmission est une des pistes à l’étude. D’autant plus que l’éducation artistique et culturelle est au coeur des pratiques de Lost In Traditions comme de La Dérive depuis plusieurs années déjà. Un accueil des jeunes, en temps scolaires ou hors temps scolaire, et des moins jeunes aussi, est prévu. Des liens seront noués avec le tissu associatif local. D’une manière générale, le public aura sa place. « Ce n’est pas une boîte noire dans laquelle s’enferme les artistes. Nous proposerons des temps avec les publics. C’est aussi pour cela que nous prévoyons de créer des espaces de circulation entre les [trois] bâtiments, pour que les gens se rencontrent » assure Mathilde Charbonneau.
Le projet progresse à son rythme et laisse une place à l’expérimentation des espaces pour que le site ressemble in fine à la manière dont les gens veulent le vivre.
Nous progressons sur ce projet au rythme du territoire et de ses habitants. Cela paraît simple et évident mais si on se laisse embarquer sur l’autoroute de la mise en oeuvre d’un projet culturel, on peut parfois passer à côté du territoire et de sa diversité.
Gabriel Durif
En attendant l’ouverture au public, les artistes invités investissent les salles des fêtes locales. « On porte une attention à ne pas fermer les portes. L’idée, c’est que ce lieu dépasse les frontières physiques du bâtiment », affirme Mathilde Charbonneau. Accueillir des artistes, leur faire partager leur création avec le public en valorisant les musiques et les danses traditionnelles – des esthétiques souvent invisibilisées dans le champ des musiques actuelles. Contribuer à l’éducation artistique et culturelle. Telles sont les missions de ce lieu en cours de création dont l’ouverture officielle est prévue dans plusieurs années. D’ici-là, les fondateurs envisagent une première Fête de la Baze, le 2 septembre 2023. Une manière de ne pas rester en vase clos et de faire connaître le futur projet aux proches voisins corréziens.
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