N°17 – Vers un été de la ruralité ?
Notre lettre d'info d'avril 2024 vient de paraître
Vers un été de la ruralité ?
Ce printemps a pour la culture en milieu rural un petit goût d’imprévu. Longtemps méprisée (on a même entendu certains parler de « culture ras des pâquerettes »), elle est l’objet de toutes les attentions depuis que la nouvelle Ministre de la culture, Rachida Dati, a déclaré que ce Printemps serait celui de la ruralité. « C’est l’impensé des politiques culturelles, pour ne pas dire l’angle mort depuis Paris », a-t-elle fait valoir le 29 février sur France Culture.
Dans la foulée, elle a lancé une grande concertation par voie numérique (on comptait 25 000 réponses aux questionnaires en ligne à la mi-mars), pendant que les DRAC et préfectures se lançaient dans un marathon de rencontres.
En Région Nouvelle-Aquitaine, hautement rurale (51% de habitants vivent à la campagne – la moyenne nationale est à 33%), se sont tenues deux rencontres, toutes deux animées par mes soins. La première à Confolens en Charente, la seconde à Sabres dans les Landes. Autour de 70 personnes à chaque fois.
Qu’ont-elles dit ? D’abord que leurs territoires étaient vivants, riches, portés par l’engagement et l’inventivité de de chacun et de tous.
Qu’ont-elles demandé ? Qu’on leur fasse confiance, qu’on ne leur explique pas comment coopérer (ils le font de longue date), qu’on ne cherche pas à reproduire mécaniquement ici ce qui se serait décidé à Paris, qu’on n’érige plus les appels à projets en religion, qu’on simplifie les démarches administratives. Et puis bien sûr, qu’on leur alloue davantage de moyens financiers et humains.
On y a entendu des défenseurs des petites lignes de train et des langues régionales, des enseignants, des bénévoles, des artistes et simples habitants, des défenseurs de l’éducation populaire (venus nombreux) et de l’éducation artistique, des maires, des conseillers départementaux, quelques (rares) représentants de députés et sénateurs, dont un collaborateur d’un député RN. Faisant fi de l’hostilité manifeste de la salle, il a dit l’importance de maintenir le premier maillon de l’éducation et de la culture dans les campagnes : l’école. Une idée pas tout à fait nouvelle, déjà chantée dans Les oubliés par le creusois Gauvain Sers, que l’on peut difficilement qualifier d’extrême droite !
On a aussi entendu des scènes labellisées, des cafés culturels, des médiathèques, des écoles de musique, des festivals, beaucoup d’associations de toute taille et de toute obédience.
Dans cette diversité des prises de parole, plus sages à Sabres qu’à Confolens, il y eut aussi quelques moments d’émotion, de grâce, d’agacement, de déjà-entendu mais aussi de bon-sens, à l’instar de la déclaration de l’énergique Collectif Egrégore « La culture en ruralité, ce n’est pas infuser en intraveineuse des éléments autorisés auprès d’autochtones acculturés ».
On espère que l’avenir donnera raison à ce collectif d’artistes qui expérimente un retour à la terre. Pour l’heure, la concertation nationale est achevée, les synthèses « remontées en centrale » (comme on dit dans le jargon), les réponses aux questionnaires en cours de décryptage. Et chacun d’attendre un grand raout national pour fin avril, avec Ministre, et qui sait peut-être, des annonces et des moyens pour un Printemps de la ruralité en fleurs ?
Sonia Moumen,
réactrice en chef et réalisatrice
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