Pollen : l’histoire peu banale d’un lieu peu banal
Polleniser l’art / Épisode 2
La durabilité d’un projet artistique ambitieux est souvent le fruit de la rencontre d’un engagement artistique et d’une volonté politique. L’histoire de Pollen est quelque peu différente et réserve quelques bonnes surprises.
Des débuts placés sous le signe du Japon
En regardant dans le rétroviseur, force est de constater que le projet initial était assez différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. Qu’on se souvienne. Le département était alors présidé par Jean François-Poncet, les frères Louret et leurs Baladins en Agenais avaient le vent en poupe, la culture était une préoccupation importante dans ce département rural. Sur la suggestion de son épouse, Marie-Thérèse Poncet, le Président du Conseil départemental lance en 1991 un programme estival d’accueil d’artistes japonais en Lot-et-Garonne. Le principe est simple et perdurera jusqu’en 2002 : chaque été, débarquent pour deux mois des artistes japonais lauréats des Gascogne Japanese Art Scolarship, un programme d’échanges culturels entre le Japon et le département du Lot-et-Garonne.
Se succèderont alors Satoko Masuda, Ko Kashiwagi, Tokihiro Satoh, Kenjiro Osakani, Keita Egami, Seigen Kyu, etc. Daniel Soulage, maire de Monflanquin, saisit le flambeau, les partenaires publics se mobilisent. Très vite, le concept d’un programme annuel de résidences d’artistes à Monflanquin, baptisé Pollen, naît. Une coordinatrice est nommée.
Un alignement des planètes plutôt rare
En 1999, quand Denis Driffort, l’actuel directeur de Pollen, prend les rênes de l’association, le projet traverse une période de crise et a besoin d’une définition plus précise. En concertation avec les élus locaux, le projet va se structurer autour de deux axes fondamentaux : une meilleure intégration au territoire, avec notamment des expositions itinérantes ou la multiplication des actions de médiation, et la volonté réaffirmée d’offrir aux artistes un espace-temps propice à la création.
Au gré des élections, élus et majorités politiques changent, mais l’association Pollen, elle, est toujours là. Un alignement des planètes plutôt rare lorsque l’on sait que l’art contemporain peut s’avérer particulièrement clivant sur le plan politique. Denis Driffort salue cette continuité de soutien : « il y a une vingtaine d’années, la structure apparaissait comme l’émanation d’une volonté politique, avec ce que ça peut vouloir dire sur un territoire. Pour de bonnes ou pour de mauvaises raisons. On a fait un travail de manière à ce que l’association soit considérée comme une structure culturelle active et non pas comme un outil politique. On a toujours veillé à avoir une relation à ce territoire et à ses élus de toutes couleurs confondues, une relation équitable. Ça a évidemment payé sur la durée. »
Pollen est une association culturelle emblématique de Monflanquin. C'est l'association culturelle qui fait rayonner Monflanquin. On en parle dans le milieu de l'art contemporain, ce qui, pour un village de notre taille, est quand même assez remarquable."
Nathalie Founaud-Veysset, maire de Monflanquin
Aujourd’hui, les bonnes fées s’appellent Nathalie Founaud-Veysset, maire de Monflanquin – « Qu’on soit à Paris, à Montpellier, à Monflanquin ou dans un village plus petit ou plus grand, je pense que la culture est un droit. Ce n’est même pas un droit, c’est une nécessité »-, ou encore Christine Gonzato-Roques, actuelle vice-présidente du Conseil départemental du Lot-et-Garonne et adjointe à la culture de Monflanquin : « La culture fait partie de nous, elle doit faire partie de notre vie. C’est une nourriture nécessaire. »
Découvrez ce que dit Nathalie Founaud-Veysset sur la question de la culture en ruralité.
L’engagement des deux femmes pour que se poursuive l’aventure de Pollen est souligné par les acteurs de l’art contemporain. Ainsi, Pierre Ouzeau, coprésident de Astre, réseau d’arts plastiques et visuels en Nouvelle-Aquitaine, rappelle combien Pollen est un projet atypique par l’ambition politique et artistique liée au projet : « Monflanquin est une petite commune. C’est tout à fait exceptionnel d’accorder des moyens d’action à l’art contemporain dans une commune de ce type-là. »
Découvrez ce que dit Pierre Ouzeau, coprésident de Astre, réseau d’arts plastiques et visuels en Nouvelle-Aquitaine. Il évoque notamment la longévité et la place singulière de Pollen dans ce réseau.
Comme quoi, 30 ans après la première résidence japonaise, et quels qu’aient été les changements politiques, Pollen est bel et bien toujours là.
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